Quand la réalité non-ordinaire perce la réalité ordinaire, comme cela se passa pour moi dans cette église russe en Allemagne, il y a 25 ans (et pour être extraordinaire, ça l’était !), ce qui nous touche, c’est l’amour. Rien d’autre que l’amour, l’émerveillement, l’exultation que « cela » soit possible et la gratitude que « cela » soit. Seulement, quelques heures plus tard, l’ancien référentiel se referme sur le « greffon », et c’est là que tout se complique. La peur de l’inconnu commence à vouloir étouffer l’amour, et si possible, l’étouffer dans l’œuf : l’ancien référentiel, se sentant condamné, devine d’instinct qu’il doit éliminer son rival avant que celui-ci ne devienne trop puissant. Autrement dit, le plus vite possible. Ce yoyo vertigineux est superbement décrit dans le livre « Après l’extase, la lessive ». Autrement dit, on ne saute pas, ou rarement, d’une octave à celle du dessus : on va plutôt, en général, faire des allers-retours entre notre octave habituelle, rassurante, et « l’au-delà » des terrae cognitae, comme on entre dans l’océan, d’abord un orteil, puis un pied, puis une jambe, puis le corps entier, puis un pas de l’autre côté, puis un petit séjour, puis d’autres, de plus en plus longs, au fur et à mesure que l’on maîtrise son angoisse, que l’on apprivoise l’inconnu et le manque de repères, jusqu’au déménagement final et définitif, l’installation à l’étranger… à l’étage. On a ficelé et emporté tous ses souvenirs, tous ses cartons, on a fait le tri de ce qu’on garde et de ce dont on n’a plus besoin. On est prêt pour une nouvelle vie, ailleurs (sur une autre fréquence). Les neurosciences ne disent pas autre chose. D’après leurs recherches, il faut 21 jours au cerveau humain pour que de nouvelles connexions synaptiques s’installent durablement, autrement dit, pour qu’un nouveau système de croyances s’établisse solidement à la place de l’ancien. Après mon « expérience mystique » de l’Eglise russe, j’ai cherché à comprendre ce qui m’était arrivé en fouillant les sources d’information disponibles à mon octave. Plus que l’incompréhension, ce qui me terrorisait, c’était cet appel intérieur que je n’arrivais pas à oublier. Malgré les années qui passaient, je ne guérissais pas de la nostalgie de cet amour-là. Je croyais que j’allais devoir me faire nonne au fond d’un couvent. Or, j’aimais beaucoup trop la vie profane et ses plaisirs pour me sentir capable de supporter une existence monastique. Et puis ces prières avec des mots appris, ces messes à heures fixes tous les jours… ça m’étouffait d’avance. Mon référentiel était tellement boulonné qu’il m’a fallu plusieurs années pour comprendre, et admettre, que je n’avais pas à entrer en religion et que je pouvais vivre simplement avec cet amour en mon cœur, n’importe où dans le monde, et de là, l’offrir à n‘importe qui, humain ou non humain. Cette religion-là (si c’en était une, au sens étymologique du verbe : « religere : relier »), m’allait parfaitement. J’avais seulement été longue à la trouver, ou à l’inventer. Si tu lis ceci, Claudio del mio cuore, tu as probablement atteint ce point. Tu te demandes comment concilier ta vie d’avant avec cet amour renversant, qui grandit en toi et dont tu ne sais que faire. La mauvaise nouvelle, c’est que je n’ai pas la réponse pour toi. La bonne, c’est que tu es libre, et que tous les possibles te sont ouverts : tu peux décider de me laisser poursuivre avec ton octave sans déranger ta vie d’ici, tout oublier et jeter notre histoire dans la poubelle « pure folie ». Tu peux décider de rester : je te rassure encore une fois, tu n’auras besoin ni de briser ton couple et ta famille, ni de m’épouser, pour cela. Rien ne t’oblige à croire ce que j’écris, rien ne t’oblige même à continuer de me lire, et il n’y aura aucune « punition », ni de ma part, ni de celle de l’octave, si tel est ton choix. Ma décision est de continuer, et, je serai sincère avec toi sur ce point comme en tout : nous pouvons ne pas nous revoir, tant que le refuge existe pour nous y retrouver, mais nous aurons besoin de pouvoir communiquer en temps réel dans notre plan. Ce n’est pas quelque chose que je veux imposer (je sais combien c’est compliqué pour toi), c’est lié aux informations que j’ai sur la suite de notre travail en binôme, que je te transmettrai dans les prochains chapitres, probablement à ton retour. Nous aurons besoin d’être en lien permanent sur le plateau de jeu pour nous coordonner et travailler correctement au service de l’octave. Si tu penses ne pas pouvoir prendre un tel engagement, c’est mieux pour nous deux que je poursuive avec Ephraïm seul. Imagine que je sois en difficulté face à une nouvelle attaque et t’appelle en soutien, par exemple. Si tu lis le message 3 jours plus tard, je serai démolie bien avant. Tu peux prendre le temps des vacances, ou plus, pour y penser et décider. Mais je ne veux rien te cacher : tu ne pourras pas rester simple lecteur ou spectateur. Les timorés, les tangents, les tièdes, - pire encore : les victimes passives et résignées, les impuissants, les « c’est comme ça et on n’y peut rien », au prochain palier, ne seront plus tolérés. Ta formation est mains-tenant achevée. Dans ce qui nous attend, si tu restes, tu seras acteur, tout comme moi. Il n’y aura plus ni maître, ni élève. Il ne peut y avoir que deux êtres libres, qui, librement, ont choisi d’évoluer et de servir ensemble. |