Côte à côte (6)

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Côte à côte (6)

 

« Ma côte d’agneau n’est pas cuite ! C’est un scandale ! »

Le serveur a rappliqué aussitôt, pire que si on l’avait menacé de lapidation imminente. Il brassait l’air comme un ventilateur, tentant probablement de calmer le client. Celui-ci ne voulait rien entendre, il continuait à vociférer :

« Si elle était correctement cuite, l’os devrait se retirer de la viande sans difficulté ! Un os de côte d’agneau, c’est comme ta queue dans une femme, ça doit entrer et sortir tout seul ! »

Le serveur était plus rouge que la côte mal cuite. Il avait affaire à un raffiné. J’étais un peu trop loin pour l'assurer, mais je crois qu’il commençait à transpirer.

Le client continuait à secouer vigoureusement la côte en signe de protestation, pour bien montrer que ça ne sortait pas. S’il faisait pareil avec les femmes, mieux valait pour elles ne pas toucher à l’os de son caleçon.

Décidé à sauver sa peau, le serveur écarlate jouait sa dernière carte : il pointait du doigt en direction des cuisines (pour accuser le cuisinier ? proposer de recuire la côte ? expliquer que c’est dans la souris d’agneau que l’os doit se détacher, pas les côtelettes ? Ou appeler des renforts pour embrocher le récalcitrant et le passer au grill avec sa viande ? …). Le gars n’a même pas attendu. Il est sorti du restaurant en claquant la porte, laissant son assiette intouchée sur la table. Le fumet de la côte fumante parvenait jusqu’à moi et me faisait saliver, même avec la porte fermée. J’étais posté près d’un transat jaune et ne perdais rien de la scène à travers la baie vitrée du restaurant.

En principe, je n’avais pas le droit de me tenir là, mais le personnel de l’hôtel était occupé par le service du déjeuner et personne ne prêtait attention à moi, ni les clients, ni les employés. Je tenais peut-être une aubaine. Si j’avais de la chance… si j’avais de la chance, ils jetteraient la côte d’agneau encore toute chaude et gorgée de jus de viande à la poubelle, dans l’arrière-cour du restaurant, et si je réussissais à me faufiler discrètement jusque-là, je mangerais à ma faim aujourd’hui, mieux que des reliquats avariés et souillés, mieux que des ordures à trier, mieux que des restes déjà rongés par d’autres, un succulent festin oui, un vrai menu de roi qui ferait disparaître un peu les miennes, visibles sous ma peau, de côtes. Parce que quand on vit dans la rue, on ne mange pas tous les jours à sa faim, encore moins propre, et encore moins choisi. C’est la rue qui décide du menu, pas toi.

Je me suis mis en marche vers l’arrière-cour, je connaissais bien le chemin, je me ravitaillais souvent là-bas, de nuit, quand je pouvais fouiller les poubelles tranquille. Evidemment, je n’étais pas le seul, il fallait partager avec les autres, défendre son bifteck, enfin, ses épluchures… Mais là, en plein midi, je serais seul, j’aurais tout pour moi, saignant, charnu, odorant, presque tombé du ciel directement dans la gueule… c’était mon jour de chance, nom d’un chien ! La truffe au vent, j’ai trottiné de toute la vitesse de mes quatre pattes vers l’objet de mon désir. Je n’avais pas encore trouvé la belle, mais je ne me sentais déjà plus rien d'un clochard.

 

 

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"A quoi ça sert l'amour ?"

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Comme je le disais à mon fils en la réécoutant : "la chanson est ancienne mais les paroles sont toujours d'actualité !". Et quand on connaît la vie d'Edith Piaf, on sait, on sent,  combien ce qu'elle chante est pour elle une réalité...

J'ai trouvé que c'était un choix tout indiqué pour le 9 août, jour de la Saint Amour... et anniversaire de ma Lutinière. Créé en 2009, le site fête ses 14 ans aujourd'hui !

 

 

 

Côte à côte (5)

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Côte à côte (5)

 

Il appelle ça « des vacances ». Ah ouais, parlez-moi de vacances. En fait, pour moi, les « vacances sur la Côte », c’est surtout grimper la côte, quatre sacs pleins à craquer sur le dos. La même quantité de travail qu’hors vacances, multipliée par quatre. Les courses, la bouffe trois fois par jour pour quatre personnes, dont deux ados en pleine croissance, la vaisselle, le rangement, la lessive, tout ça sans l’électroménager de la maison, et sans aide parce qu‘on est en vacances : "tu as le temps, tu peux bien laver trois assiettes et deux paires de chaussettes, on ne va pas payer le ménage alors qu’on peut le faire nous-mêmes". Sauf que « nous », dans les faits, c’est moi. Les deux ados scotchés sur leur écran, le paternel scotché… à son transat. Il doit être aimanté, le transat, tellement il n’en décolle pas. Ils sont devenus siamois, je crois. Sa Seigneurerie doit avoir les fesses du jaune du tissu, ou le transat se tapisser de poils de cul.

 

« J’ai besoin de me reposer, tu comprends. Je travaille tellement dur toute l’année. Toi, tu es à temps partiel, tu as le temps de te reposer et de profiter de tes jours libres ». Si mes jours libres l’étaient vraiment, oui... Mais comme ils sont « libres », ils sont dédiés à tout ce que Mister Temps Plein n’a pas le temps de faire : aux contrôles médicaux des enfants, aux réunions parents-profs, à la paperasse, aux courses alimentaires et non alimentaires, à l’accueil des artisans, du facteur, du livreur, des employés pour le relevé des compteurs ; aux imprévus comme jouer la garde-malade, aller récupérer les colis à la poste, aller récupérer les enfants à l’école en cas d’absence de profs, en cas d’absence de bus, aller récupérer les pièces manquantes pour réparer tel truc au magasin d’outillage, aller récupérer les médicaments à la pharmacie, trois fois rien, juste les gouttes ophtalmiques tous les quinze jours pour l’aîné, la Ventoline pour l’asthme du cadet et les remèdes miracle pour Mister Temps Plein, qui se croit mourant dès qu’il a un rhume … Parallèlement, au boulot, je dois abattre avec un temps partiel le boulot d’un temps plein, parce qu’ils n’ont engagé personne pour le 2e mi-temps : je travaille pour deux avec un demi-salaire.

 

Si encore il n’y avait que les vacances, bon, je me dirais : ok, c’est deux mois de galère à passer, serre les dents, c’est seulement un sixième de l’année ! Mais en plus des vacances, il y a la préparation des vacances (étudier dès janvier ou février les catalogues, les sites, choisir la destination, l’hébergement… « parce que sinon, tu sais comment c’est, quand on voudra partir, tout sera pris ou hors de prix » !), et aussi le retour des vacances : trois valises de linge sale à laver, trier, repasser, ranger ; les courses à refaire, les légumes à cuisiner (« ils ont de bons produits locaux et frais là-bas, profitons-en pour en rapporter ! »), le quotidien à remettre en route, accessoirement du boulot à préparer pour mon mi-temps-compte double. Des broutilles !

 

Ah, et j’oubliais : le soir, vacances ou pas vacances, en plus d’être épouse et mère, je ne dois pas oublier d’être aussi amante : parfumée, pomponnée, aguichante, amoureuse et entreprenante. Tout un programme !! « Ah bon, tu es encore fatiguée ? Mais de quoi ?? »

 

De quoi ?? D’être la femme à tout faire de ces Messeigneurs, Sire Plein Temps et ses deux vassaux pubertaires, dynamiques et causants comme des endives. Alors vous savez quoi ? Les vacances, les prochaines, vous les passerez entre vous. Je me casse avec mes copines Temps Partiel et Mères au Foyer, vous passerez les vôtres où vous voudrez, à la maison ou à l’hôtel, mais sans moi. Ciao, Messeigneurs, le Moyen-Âge, c’est fini. Sortez vous les doigts du cul et vous verrez que vous pouvez en faire quelque chose, il y en a quand même dix, ça laisse du choix et de la liberté. Comme un temps partiel !

 

 

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La tendresse

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Je ne connaissais ni l'instrument, ni l'interprète, mais le texte, oui. La chanson d'origine est de Noël Roux et Hubert Giraud, interprétée par Marie Laforêt en 1964, reprise par beaucoup d'autres, comme Bourvil. Je préfère cette interprétation-ci !


 
On peut vivre sans richesses
Presque sans le sou
Des seigneurs et des princesses
Y en a plus beaucoup
Mais vivre sans tendresse
On ne le pourrait pas
Non, non, non, non
On ne le pourrait pas
On peut vivre sans la gloire
Qui ne prouve rien
Être inconnu dans l'Histoire
Et s'en trouver bien
Mais vivre sans tendresse
Il n'en est pas question
Non, non, non, non
Il n'en est pas question
Quelle douce faiblesse
Quel joli sentiment
Ce besoin de tendresse
Qui nous vient en naissant
Vraiment, vraiment, vraiment
Le travail est nécessaire
Mais s'il faut rester
Des semaines sans rien faire
Eh bien, on s'y fait
Mais vivre sans tendresse
Le temps vous paraît long
Long, long, long, long
Le temps vous paraît long
Dans le feu de la jeunesse
Naissent les plaisirs
Et l'amour fait des prouesses
Pour nous éblouir
Oui mais sans la tendresse
L'amour ne serait rien
Non, non, non, non
L'amour ne serait rien
Quand la vie impitoyable
Vous tombe dessus
Qu'on n'est plus qu'un pauvre diable
Broyé et déçu
Alors sans la tendresse
D'un cœur qui nous soutient
Non, non, non, non
On n'irait pas plus loin
Un enfant nous embrasse
Parce qu'on le rend heureux
Tous nos chagrins s'effacent
On a les larmes aux yeux
Mon dieu, mon dieu, mon dieu
Dans votre immense sagesse
Immense ferveur
Faites-donc pleuvoir sans cesse
Au fond de nos cœurs
Des torrents de tendresse
Pour que règne l'amour
Règne l'amour
Jusqu'à la fin des jours
 
 
 
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