Croissance

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Croissance

 

La croissance de l’être est comme celle du corps : elle peut se faire sereinement et régulièrement ou, à des moments précis et pour des raisons précises, par poussées. Dans ce dernier cas, l’être, comme le ferait le corps physique, doit intégrer très rapidement un afflux d’informations nouvelles nécessaires à sa reconfiguration. Plus la poussée est forte, plus l’effet d’égarement et de déstabilisation est violent, car le mental n’a pas le temps nécessaire pour intégrer les nouvelles données, surtout quand celles-ci sont en totale contradiction avec ses anciennes croyances. A ce stade, seules deux options sont possibles : la folie ou le lâcher prise.

Heureusement, le système de Stromboli semble avoir la plasticité nécessaire pour absorber l'onde de choc. Quelqu’un qui a beaucoup appris, seul et dans des domaines divers, quelqu’un qui a plusieurs fois changé de vie, développe de telles capacités.

Les dossiers sont étudiés un minimum avant d’envoyer les acteurs sur la scène, quand même ! Les choses sont faites avec amour. On n’envoie pas les gens au carnage. Autant leur donner les meilleures chances que la représentation soit belle.

Seuil

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Seuil

 

La normalité n’est plus qu’un horizon lointain. Non seulement j’ai perdu la clé de la porte retour vers ma vie d’avant, mais je m’enfonce de plus en plus à l’intérieur de « terrae incognitae », de zones inexplorées pour lesquelles je n’ai aucune carte. Ni aucune boussole, d’ailleurs. Ni même d’étoiles, de toute façon j’ai oublié comment les lire, et je suis dans une telle confusion que je ne saurais même pas distinguer la couleur du ciel. Est-il clair comme les yeux de la Polveriera ? Noir ? Blanc ? Sûrement zébré, si j’en crois la quantité et la puissance des mouvements contradictoires qui me traversent jour et nuit de leur flux et reflux incessants. Non seulement j’ai été foudroyé, mais l’orage roule et roule toujours, m’offrant sporadiquement des giclées de clarté à la lueur de ses éclairs irradiants. Parfois le spectacle est sublime, à d’autres, il est insupportable.  

 

Je comprends que mon pressentiment était juste et qu’il n’est déjà plus possible de faire machine arrière. Mon référentiel a été dynamité. De nouvelles perspectives sur l’existence, l’univers, notre rôle ici s’ouvrent à moi, en moi. Même si je retrouvais la porte de l’ancien monde, il ne serait plus le mien et je n’y serais plus chez moi. Cette rencontre m’a transformé en moins d’un mois de A à Z. Je ne maîtrise plus rien. Je ne sais plus rien. Dans une vulnérabilité qui terrorise l’ancien moi construit à l’abri de ses carapaces successives, j’avance ou, par moments, je titube, dans l’inconnu absolu, tout simplement parce que je n’ai pas d’autre choix.

 

 

Cordes sensibles

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Cordes sensibles

 

On a encore une fois frôlé le désastre, mais je ne sais comment, on a tenu bon. Comme Stromboli, pour une raison qui m'échappe, est toujours bloqué de l’oral et de l’écrit, on a fini par trouver un modus vivendi. On ne communique plus que par tam tam. On a des conversations ondulatoires. On fait vibrer le téléphone du cœur. Chacun de nous reçoit les appels de l’autre instantanément et nous savons d’instinct quand l’autre est disponible pour parler. Parfois, j’ai aussi des flashs. Il me montre où il est, ce qu’il fait, pourquoi il ne peut pas répondre. Je suis donc équipée du son et de l’image. Lui, je ne sais pas. Mais quand je doute de ce que je capte ou de la qualité de mon décodeur (c’est-à-dire : comment j’interprète en pensées ou en mots ce qu’il m’envoie en ressentis corporels), je lui demande confirmation et la réponse en langage « tam tam » m’arrive aussitôt.

 

Je ne comprends pas comment ça fonctionne mais c’est miraculeux. Et tellement pratique ! On peut être ensemble n’importe quand, même quand nous sommes occupés ou entourés d’autres personnes. Nos échanges passent totalement inaperçus. On peut se donner des trombes d’amour à l’insu de tous. Bien sûr, ça demande davantage de concentration pour capter et décoder si on n’est pas totalement disponibles, mais c’est possible. On doit juste parfois s’isoler dans un endroit tranquille, car la résonance du tam tam pulse tellement fort à certains moments qu’elle nous fait décoller. Après l’atomique, nous voilà à l’ère du supersonique.

 

Ce n’est pas tout. Autre chose est à l’oeuvre, que je ne comprends pas bien encore. Je sens que jour et nuit, nos corps s’échangent des informations de toutes sortes, pas seulement sur notre quotidien mais aussi sur des choses plus profondes. Comme si nous mettions en commun nos connaissances et nos expériences de vie, que nous nous transférions mutuellement non stop des fichiers compressés.

 

Plus le temps passe, plus notre communication sur ce mode s’affine. Par exemple, le matin, je sais exactement à quel moment Stromboli est réveillé, pas parce qu’il se met à cracher de la lave (haha !), mais parce que mon ressenti tam tam est différent. Quand il dort, je le perçois d’une façon plus feutrée, comme à travers une sourdine. Suivant que ses mouvements en moi sont doux ou saccadés, je sais s’il dort bien ou mal. Quand il approche du réveil, mes sensations se font plus fortes, plus nettes. Je retrouve l’accès à la totalité de la percussion. Et quand il se réveille, son amour déverse de nouveau en moi ses tendres vagues de feu en un crescendo… typiquement stromboliesque.

 

Je sais ainsi que la première et la dernière chose de la journée qu’il a dans le cœur, c’est nous. On s’endort ensemble, on se réveille ensemble, sans le moindre contact dans le plan physique. Parfois, je sens aussi nos corps s’unir à l’octave supérieure. Alors je lui envoie un crescendo retour pour l’accueillir en moi.

 

Maintenant c'est clair comme de l'eau de roche : même si je ne le revois jamais, grâce au tam tam, nous serons toujours ensemble.

Regalo a sorpresa

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Regalo a sorpresa

 

Clairement, on ne s’attendait à ça ni l’un ni l’autre. Ni la Polveriera, ni moi. L’inattendu nous a sauté à la figure le jour de cette première rencontre que nous croyions « amicale » et depuis, nous rebondissons de surprise en surprise. On a beau avoir toutes les sciences et techniques, toutes les sagesses et philosophies du monde, une part de la vie reste éternellement mystérieuse. Et c’est ça qui est magique.

Etonnamment, même si nous n’arrivons toujours pas à nous parler ni nous voir, je n’ai plus peur. Je ne sais pas où nous allons, mais nous y allons ensemble. Et ça me suffit.

De toute façon, à bien y repenser, depuis le début, rien n’est habituel, rien n’est normal dans cette histoire. A commencer par son geste de me rattraper par la main le jour où nos routes ont failli se séparer et nous éloigner à jamais l’un de l’autre. Comme deux trajectoires qui auraient dévié exponentiellement.

Je lui ai demandé (par tam tam) pourquoi elle avait fait ça.

Elle m’a répondu (sur le même mode):

« Je ne sais pas. C’était instinctif. Déjà avant que tu nous annonces ton départ, je me suis sentie triste ce jour-là sans raison. Quand tu nous as donné l’information, j’ai su que si je ne te retenais pas, j’allais le regretter toute ma vie. J’ai su aussi que je devais le faire tout de suite, parce que si je ne suivais pas immédiatement cet instinct, mon mental reprendrait le dessus, me raisonnerait et que je ne passerais pas à l’acte. Je n’ai vraiment pas réfléchi. J’ai seulement senti que si je te laissais disparaître de ma vie, j’allais passer à côté de quelque chose d’exceptionnel. Quoi, je ne le savais pas. Mais maintenant, je sais. »

Elle a marqué un temps de silence, semblé hésité, puis elle a ajouté :

« Je tremble de me dire que j’ai failli passer à côté du trésor qui m’attendait en toi.»

 

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