Cadavres exquis (écrits par des enfants de 8 à 10 ans) (2012)

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  CaDaVrEs    eXQUIS         
 

 

- Le méchant chien mange au marché.

- Le canard décevant regarde dans la lune.


- Un grand arbre boîte sur le mur.

 

- Les lapins verts chantent à l'école.

 

- La belle banane joue avec son oeil.        

 

- Les vieilles amygdales brûlent dans l'univers.              

 

- L'autralopithèque métallique fait le ménage avec son épée.

 

 

L'échangeur de mots (2012)

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L' écHaNGeUR de MoTS

  

Choisir dix mots (minimum) d'un texte et les remplacer par dix autres mots de son choix. 

 Ici à partir d'un extrait du "Buveur d'encre" (Eric Sanvoisin), livre utilisé pour un autre atelier d'écriture.

 

 

  extrait-buveur-d-encre.jpg        

 

 

Nous avions nous-mêmes testé le jeu sur le début de l'extrait avant de le proposer aux enfants. Voici ce que donnait le texte de ma partenaire après passage à "l'échangeur de mots" :

 

J'ai vu, de mes jambes nues, le chat manger un livre.

Non, je n'ai pas la rubéole.

Pendant cinq minutes, il s'est promené dans les toilettes. Les bras fermés, il se déplaçait en silence, les bras tendus droit derrière lui. On aurait dit qu'il écoutait le bruit de la voiture.

Subitement, il a saisi une grosse souris et tout est devenu encore plus sombre...

 

Et voici le mien :
 

J'ai vu, de mes yeux vu, le monstre mâchouiller une taupe.

Non, je n'ai pas la berlue.

Pendant cinq minutes, il s'est promené dans les souterrains. Les yeux fermés, il se déplaçait en rampant, les tentacules tendus droit devant lui. On aurait dit qu'il écoutait le bruit de la fin.

Subitement, il a croqué un gros ver de terre et tout est devenu encore plus effrayant...

 

 

Mais les enfants sont allés encore beaucoup plus loin dans l'absurde et dans l'art de donner le frisson, comme dans cette création à quatre mains :

 

J'ai vu, de mes yeux vu, le client inconnu boire un bébé.

Non, je n'ai pas la berlue.

Pendant cinq minutes, il s'est promené dans les rayonnages. Les yeux fermés, il se déplaçait en silence, les yeux tendus droit devant lui. On aurait dit qu'il chantait le bruit des livres.

Subitement, il a saisi un p'tit bébé et tout est devenu encore plus fou...

Il ne l'a pas tué.

Il a seulement mordu les jambes au milieu et là, dans la fente ainsi pratiquée, il a planté un couteau tout droit sorti de son coeur. Sa bouche s'est mise à aspirer. Sur son visage, il y avait du plaisir comme si le bébé contenait du coca-cola et des glaçons. Il faut dire qu'il faisait tès chaud; un temps à ne pas s'aventurer dans un crime...

 

                                                          Louisa & Victoria

 

Helena, qui a préféré travailler seule, a privilégié une autre option : échanger les dix mots contre des mots à la sonorité voisine, parfois en les inventant elle-même. En résulte un texte étrange, qui oscille entre humour noir et fantastique...

 

J'ai vu, de voeux vu, le client inconnu boire un livre.

Non, je n'ai pas la merlue.

Pendant cinq minutes, il s'est promené dans les saisonnages. Les yeux fermés, il se déplaçait en silence, les bras tendus droit devant lui. On aurait dit qu'il écoutait le bruit des lits.

Subitement, il a saisi un p'tit rouquin et tout est devenu encore plus fou...

Il ne l'a pas couvert.

Il a heureusement écarté les pages du milieu et là, dans la pente ainsi pratiquée, il a planté une paille tout juste sortie de sa poche. Sa mouche s'est mise à transpirer. Sur son mirage, il y avait du plaisir comme si le livre contenait du jus d'orange et des garçons. Il faut dire qu'il faisait tès chaud; un temps à ne pas s'aventurer dans une horlogerie...

 

                                                                                         Helena

 

D'autres jeunes auteurs ont choisi de créer des textes plutôt drôles qu'angoissants, mais je n'ai malheureusment pas pu conserver leur oeuvre pour la reproduire ici.

Tous ont pu finir le jeu, les francophones "de souche" aidant parfois leur partenaire à trouver le bon mot. Les textes transformés étaient d'univers et de tons très différents; nous nous sommes beaucoup amusés en les écrivant... et en les écoutant !

 

 

  au lutin bleu aminus3 plaisir d ecrire

 

Un grand merci pour leur participation à :

 

Louisa
Victoria
Agata
Helena
Claire
Maeva
Laetitia
Nicolas
Augustin
Lucy

Sylvie(s)

 

Chapeau gibus ensoleillé-2 

 

Atelier de conte et d'écriture autour des mots (1) (2012)

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Atelier de conte et d'écriture

sur le thème des MoTS

 

 

L'atelier est proposé à "Raconte-moi encore" avec Sylvie Beythan-Ory, conteuse.

Après notre création à 4 mains autour du "Coquelicot qui se sentait tout seul" l'été dernier, nous avons eu envie de nous associer pour une nouvelle activité, davantage centrée sur l'écriture mais toujours dans une approche ludique.

  

 

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Atelier de conte et d'écriture autour des mots (1) (2012)

En savoir plus sur "Raconte-moi encore" 

 

En savoir plus sur la présentation à 2 voix et 4 mains

du "Coquelicot qui se sentait tout seul..."

 

 

Dix enfants de 8 à 10 ans sont présents, tous francophones. Pour certains, le français n'est pas la langue maternelle. Une partie d'entre eux me connaît à travers l'atelier sur le Coquelicot.

Après l'accueil et les présentations, Sylvie conte, seule, la brève histoire de "L'attrapeur de mots" (disponible en poche ou en album).

 

 

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En savoir plus sur le livre et son auteur / commander le livre

 

 

Nous laissons le public exprimer ses impressions et ses questions sur l'histoire. Puis, nous proposons aux enfants trois jeux d'écriture, entrecoupés par un goûter entre le 1er et le 2e jeu. Durant le goûter, le jeu du "téléphone arabe" nous permet de nous amuser tout en restant dans le thème.

 

 

extrait 4 

Jeu n°1 : Ecrire collectivement des "cadavres exquis"

 

Je présente rapidement le jeu et ses principes aux enfants : son origine, ses créateurs, l'importance du hasard et de l'effet de surprise...                 

Nous avions prévu différents "trésors à mots" où les enfants en panne d'idées pourraient piocher des noms, des verbes, des adjectifs...

Dans l'ensemble, ils n'en ont pas eu besoin : leur imagination et leur vocabulaire ont suffi.

Certaines créations sont vraiment "exquises" (pour ma part, j'aime particulièrement les deux dernières !!).

 

Lire les cadavres exquis obtenus

En savoir plus sur le jeu du "cadavre exquis" 

 

 

 

 

extrait 1 

Jeu n°2 : Par deux et à l'écrit, transformer un texte en "attrapant" 10 de ses mots au choix (minimum) et en les remplaçant par d'autres mots.

 Les mots utilisés pour la réécriture peuvent être choisis :    

*de façon aléatoire, comme dans le cadavre exquis, pour "casser" la logique et créer des associations d'idées surprenantes

*de façon à recréer un autre texte, cohérent mais différent du premier, écrit avec un humour "décalé". 

 

 

 

Lire quelques exemples

 

 

          extrait 2 

Jeu n°3 : A l'oral, en conclusion de l'atelier . Se mettre dans la peau du personnage et donner libre cours à son imagination.

 "Si c'était toi l'attrapeur de mots, quels mots attraperais-tu ? Pour en faire quoi ? Comment t'y prendrais-tu pour les voler ?" etc

 Là encore, les idées des enfants sont originales, personnelles et très variées. Personne n'a répondu "je ne sais pas" ! 

 

 

Lire les propositions des enfants 

 

 

 

"Derrière le rideau"

Rédigé par Sylvie PTITSA 7 commentaires
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https://ekladata.com/Un1BgFqhvgc4cTBekcF5mNViWUg.jpg            

 

 

  

Elle était née sans bras. 

Sans bras elle était née… 

Ainsi la vie l’avait-elle voulu. 

On ne discute pas avec la vie, pas vrai ?

 

Elle était née sans bras et elle s’en désolait. 

Les autres se moquaient d’elle :

 

« Des bras ! Mais pour quoi faire ? On ne voit vraiment pas à quoi ils pourraient bien servir… »

 

Elle, elle le savait, pourtant. Si elle avait eu des bras, elle aurait été tellement plus rayonnante. Elle aurait pu donner tellement plus d’amour, de douceur, de lumière. Elle aurait pu atteindre des régions tellement plus noires et reculées. Il y avait tant de peines et de douleurs à porter et à illuminer, en bas… elle le savait.

  

Les autres n’étaient pas d’accord.

 

« Nous vivons dans le ciel. C’est là qu’est notre place. Si notre rôle était d’aider les créatures de la terre, alors, oui, nous aurions des bras. Mais nous n’en avons pas. C’est bien la preuve que nous devons rester à notre place, et nous contenter de briller ici, de loin, du haut du ciel. »

  

De fait, les étoiles ont des bras. Mais des bras si petits… si fins… si transparents… si loin de la terre et de ceux qui l’habitent… que de là-bas, on ne les voit presque pas. Pour elle, ses bras d’étoile n’étaient que des moignons. Des bourgeons jamais épanouis. Des ailes rognées qui suffisaient à la porter dans le ciel, à l’accrocher dans l’infini, mais trop faibles pour lui permettre de se déplacer, de choisir où et à qui porter sa lumière…

 

 Si l’étoile tenait tant à rejoindre la terre, c’est aussi qu’elle y avait un ami. Un arbre. Un plaqueminier. 

 

L’amitié d’arbre à astre n’est pas chose facile. Ils ne pouvaient se retrouver que la nuit. Ils avaient besoin du vent et des oiseaux pour se porter leurs paroles. Entre l’aller et le retour, il pouvait s’écouler plusieurs années-lumière. Sur le voyage des messagers planait la menace de mille dangers imprévisibles... Des mots se perdaient en chemin… D’autres disparaissaient mystérieusement, percutés par un astéroïde… attirés par la force gravitationnelle d’une planète trop lourde… effilochés aux piquants d’une galaxie. Les murmures de l’arbre à l’astre, les lueurs de l’étoile aux branches du plaqueminier, arrivaient souvent incomplets, déformés, incompréhensibles… ou, pire, ils n’arrivaient jamais. Mais eux étaient habitués à cette conversation trouée d’intervalles et d’attentes, aux mailles si fines qu’elles semblaient toujours prêtes à se déchirer. Les silences aéraient leur dialogue comme une partition. Leur amitié coulait rivière : tantôt visible, tantôt cachée.

 

Une époque de plomb tomba sur le monde. Un temps immobile où même le vent fut à bout de souffle. Un temps de sécheresse glacée qui chassa les oiseaux. Ceux qui voulurent rester gelèrent les uns après les autres. Leurs petits corps raidis percutaient le sol avec un bruit mat.

 

Peu à peu, lentement, l’arbre dépérissait. Il ne pouvait quitter l’endroit où étaient plantées ses racines. Il ne pouvait pas plus quitter la terre que l’étoile ne pouvait quitter le ciel…

 

Faute de vent, faute d’oiseaux, faute de nuages pour porter les messages et protéger les oiseaux, l’arbre et l’étoile devinrent invisibles l’un pour l’autre. Une poussière de temps, un sable de silence amoncelèrent entre eux des dunes hautes comme des murs.

 

L’arbre perdit ses fruits. Puis ses feuilles. Un tapis feu et vert s’étendit sous ses branches, qui pourrit, se décomposa, disparut finalement, absorbé par l’humus. Dans les secrets de son écorce, une dernière sève, très faiblement, palpitait encore.

 

L’étoile ne voyait plus son ami l’arbre, mais elle sentait qu’il épuisait ses forces. Si elle n’avait que des moignons de bras, les étoiles ont un cœur, et le sien lui disait que l’arbre avait besoin de sa présence. Il se tordait de ne pas savoir comment la lui apporter.

 

Epinglée à la nuit comme un papillon à la planche d’un collectionneur, l’étoile vit, la première, luire au loin les yeux vides du fourgon lancé à toute allure sur le chemin de la forêt.

 

L’arbre, perçut, le premier, le cliquetis des haches et des scies bringuebalant à l’arrière.

 

La nuit allait finir.

 

Le jour se levait, près de les séparer sans qu’ils aient pu se dire au revoir.

 

Au moment où la dernière goutte de sève du plaqueminier s’éteignit, l’arbre se sentit soulevé de terre par la force d’une tendresse inouïe.

 

Stupéfaites, les étoiles virent passer devant leurs yeux incrédules le premier arbre volant de leur histoire d’étoiles. Silence abasourdi… De mémoire d’étoile, jamais on n’avait assisté à pareil prodige.

 

Mais le véritable prodige était ailleurs. L’arbre ne volait pas. Il était maintenu dans l’air par une infinité de bras qui, supportant délicatement ses racines, son tronc, ses branches, et jusqu’à la pointe de ses derniers rejets secs et nus, lui faisaient traverser l’espace en le berçant dans leur filet de lumière.

 

Tous ces bras émanaient de la petite étoile, - celle qui, si longtemps, s’était désespérée de ne pas en avoir.

 

« Mes enfants, dit la lune. La nuit va s’achever, et tout ceci disparaître avec nous. Ce qui a disparu n’en continue pas moins à exister quelque part, même s’il passe dans l’invisible. A compter d’aujourd’hui, il poussera parmi nous un arbre de la terre, veillé par une étoile qui étendra sur lui les rayons de ses bras comme un soleil caché. Regardez bien autour de vous. Peut-être y en a-t-il d’autres, peut-être forment-ils même une immense forêt…

 

Les étoiles naissent sans bras, mais il peut arriver qu’il leur en pousse.

 

Les arbres vivent, et naissent, et meurent en terre, mais la même force qui fait pousser des bras aux étoiles peut les arracher de la terre et les replanter ailleurs, même en plein ciel.

 

Le monde est bien plus vaste et bien plus étonnant que le minuscule coin de l’espace où vous êtes rassemblées et que vous croyez connaître, mes enfants.

 

L’univers est bien plus inventif et plus aimant qu’un collectionneur qui épinglerait les étoiles sur une planche et les feuilles d’arbre sur une autre. Des liens invisibles et secrets unissent toutes choses. Des formes de vie inimaginables se côtoient, se rejoignent et, plus inimaginablement encore, s’allient. Le jour nous retire du regard des hommes. Nous sommes cependant toujours là, derrière le rideau. Nous n’avons pas changé de place. Nous sommes seulement masquées… jusqu’à la prochaine nuit. Ce soir, nous reviendrons. Alors, de nouveau, nous ouvrirons pour ceux qui voudront les franchir les portes d’émerveille». 

 

 

08.01.2012

Texte placé sous copyright

 

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